Le Bidonville de Calais est-il en France ?

» Posted on 12 novembre 2015 in Société

mediapart.fr

Laurence Thibert, Hannane Mouhim et Mady Denantes, infirmières et médecin de la maison de santé pluriprofessionnelle de Pyrénées Belleville à Paris accompagnées de Pascal Teulade avons répondu à l’appel de Médecins du monde pour apporter notre aide à Calais. Et « nous avons été abasourdis, choqués par ce que nous avons vu ».

Nous sommes 4 citoyens dont 3 soignants et, nous avons l’habitude de gérer la maladie, le malheur de la maladie, c’est notre métier.

Nous travaillons dans un pays où nous sommes aidés, conseillés, soutenus par des autorités sanitaires, des autorités qui nous proposent des protocoles de suivi, des protocoles de prise en charge de qualité, des autorités qui gèrent les épidémies.

Nous savons où faire appel si nous recevons une jeune femme en danger d’être violée, si nous craignons qu’un enfant soit en danger.

Nous n’avons pas l’habitude d’abandonner une jeune femme de 20 ans qui pleure à l’idée de passer une nouvelle nuit dans le bidonville où elle a été agressée la veille.

Nous n’avons pas l’habitude de voir des jeunes gens désespérés, mal nourris, épuisés par un terrible voyage et qui viennent nous voir avec des mains déchirés par les barbelés, des talons cassés par des chutes terribles pour passer à tout prix en Angleterre.

Mais reprenons l’histoire de Calais, ou plutôt de son bidonville.

Un bidonville de plus de 3000 personnes installées sur une décharge publique, battue par les vents sur une zone appelée sur les cartes : la zone industrielle des dunes.

Ses habitants et les médias l’appellent « la nouvelle jungle ».  Pourquoi ce nom ? Parce que jungle veut dire « petit bois «  en Afghanistan et que avant d’arriver dans ce bidonville, les exilés étaient dans un petit bois qu’ils appelaient donc jungle.

Mais ici il n’y a pas de petit bois, il y a des dunes et un bidonville.

Nous n’aimons pas ce terme de jungle qui sous entend « habité par des sauvages ».

Les seuls comportements de « « sauvages » que j’y ai vus sont ceux de l’état français qui y a abandonné une population en danger sur son territoire.

J’ai été au contraire étonnée par le calme, le respect dont faisaient preuve nos patients. Les attentes étaient longues à MdM, mais les énervements étaient rares.

Souvent la queue à MdM signifiait : pas de repas car pour le repas il y avait une autre queue à Jules Ferry, le centre d’accueil, où des repas sont distribués une fois par jour.

Et tous les jours nous devions refuser des candidats aux consultations car nous ne pouvions répondre à toutes les demandes.

Face à notre difficulté à refuser, à « trier » (on va juste voir le monsieur là-bas qui a l’air très mal »), face à nos excuses (on est désolés on ne peut pas vous recevoir aujourd’hui, revenez demain) nous avons plusieurs fois reçu un sourire de compréhension, un « we understand »

Dans ce bidonville, les règles de santé publique n’existent pas. Ici, nous ne sommes plus en France mais dans un pays pauvre. Ou en guerre. Ou victime d’une catastrophe. Mais même dans les pays pauvres victimes de guerre ou de catastrophe, les camps sont mieux tenus…

L’une de nous était en….

 

 

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